Propriétaires, saviez-vous que la nouvelle loi de 2025 permet désormais une expulsion en 15 jours en cas d'impayés ? Ne confondez plus les règles du bail d'habitation avec celles du bail commercial. Notre décryptage complet ici.
Bail Pro vs Habitation en Côte d'Ivoire : Les pièges juridiques à éviter
Le contrat de bail est un acte juridique central par lequel un bailleur met un local à la disposition d'un preneur contre paiement d'un loyer. Cependant, selon que ce local sert à loger une famille ou à exploiter une entreprise, les règles du jeu changent radicalement.
En droit ivoirien et communautaire (OHADA), la distinction entre le bail à usage d’habitation et le bail à usage professionnel est cruciale. Voici une analyse détaillée des différences majeures pour sécuriser vos relations contractuelles.
1. Le Champ d'Application et l'Objet du Contrat
La première différence, souvent visible dès l'entête du document, réside dans la nature de l'activité exercée et la loi applicable.
Le Bail à usage professionnel : Il est régi par l'Acte Uniforme portant sur le Droit Commercial Général (AUDCG). Selon l'article 103 de cet acte, il concerne toute convention permettant au preneur d'exercer une activité commerciale, industrielle, artisanale ou toute autre activité professionnelle. Il s'applique aux locaux principaux, mais aussi aux terrains nus édifiés et aux locaux accessoires.
Le Bail à usage d'habitation : Il est principalement régi par le Code Civil (articles 1709 et suivants) et par des lois nationales spécifiques (comme la Loi N° 2025-221 en Côte d'Ivoire). Son objet est la jouissance d'un local pour y vivre.
À noter : L'article 134 de l'AUDCG précise que les dispositions relatives au bail professionnel sont d'ordre public. On ne peut donc pas y déroger contractuellement au détriment du locataire.
2. Le Droit au Renouvellement : Une Protection du Fonds de Commerce
C'est sans doute la différence la plus marquante et la plus protectrice pour le commerçant.
Pour le professionnel : Le droit au renouvellement est acquis. L'objectif est de protéger la stabilité du fonds de commerce. Selon l'article 123 de l'AUDCG, le droit au renouvellement est acquis au preneur qui justifie avoir exploité l'activité prévue au bail pendant une durée minimale de deux (2) ans.
Si le bailleur refuse ce renouvellement sans motif grave (comme le non-paiement des loyers), il doit verser une indemnité d'éviction au locataire pour réparer le préjudice causé (perte de clientèle, frais de déménagement, etc.).
Pour l'habitation : Pas d'automatism strict. En matière d'habitation, bien que la tacite reconduction existe souvent (le bail se prolonge si personne ne dit rien), il n'y a pas de "droit au renouvellement" aussi puissant que dans le commerce. Le propriétaire peut reprendre son logement plus facilement, notamment pour l'habiter lui-même ou y loger sa famille, sous réserve de respecter le préavis légal.
3. La Rupture du Contrat et le Congé : Délais et Procédures
La manière de mettre fin au contrat diffère grandement, le législateur cherchant à protéger l'outil de travail d'un côté et le logement de l'autre.En matière de Bail Professionnel
Le formalisme est lourd pour protéger l'activité économique :
Le préavis : Pour un bail à durée indéterminée, le congé doit être donné par acte d'huissier au moins six (6) mois à l'avance.
La résiliation pour faute : Si le locataire ne paie pas ou viole le contrat, le bailleur doit obligatoirement lui adresser une mise en demeure. Le locataire a alors un mois pour régulariser la situation. Ce n'est qu'après ce délai, si la faute persiste, que le juge peut être saisi.
En matière de Bail d'Habitation
Les procédures sont distinctes et viennent d'être renforcées en Côte d'Ivoire par la Loi N° 2025-221 du 28 mars 2025 :
Le préavis : L'usage fixe généralement le délai de congé à trois (3) mois pour reprendre le local.
Expulsion accélérée : La nouvelle loi ivoirienne de 2025 prévoit que le juge des référés doit statuer dans un délai maximal de quinze (15) jours pour une demande d'expulsion en cas de manquement aux obligations (ex: non-paiement). De plus, le commandement de libérer les lieux doit accorder un délai minimal de huit jours.
4. La Cession de Bail et la Sous-location
Bail Professionnel : La cession du bail est très favorisée. Si le commerçant cède son fonds de commerce (son entreprise), le bailleur ne peut pas s'opposer à la cession du bail qui l'accompagne. La cession s'impose à lui.Bail d'Habitation : La règle est inverse. Selon l'article 1717 du Code Civil, le locataire a le droit de sous-louer ou céder son bail sauf si cette faculté lui a été interdite. En pratique, la quasi-totalité des contrats d'habitation interdisent la cession ou la sous-location sans l'accord écrit du propriétaire.
En Résumé
Critères
Bail à Usage Professionnel (OHADA)
Bail à Usage d'Habitation (Code Civil / Loi 2025)
Texte de base
Acte Uniforme Droit Commercial Général (AUDCG)
Code Civil & Lois nationales (ex: Loi 2025-221 CI)
Droit au renouvellement
Acquis après 2 ans d'exploitation.
Non automatique (tacite reconduction possible).
Rupture par le bailleur
Préavis de 6 mois (si durée indéterminée) + Indemnité d'éviction si refus de renouvellement.
Préavis généralement de 3 mois. Procédure d'expulsion accélérée (15 jours) en cas d'impayés.
Mise en demeure
Obligatoire, délai d'1 mois avant saisine du juge.
Commandement de libérer les lieux (délai min. 8 jours).
Cession du bail
S'impose au bailleur si cédé avec le fonds de commerce.
Interdite sans accord du bailleur (en général).
IVOIRE-JURISTE

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