Le capital social : Combien faut-il et comment le libérer pour créer sa SARL ou SA en Côte d'Ivoire ?
La constitution d’une société en Côte d’Ivoire, qu’il s’agisse d’une Société à Responsabilité Limitée (SARL) ou d’une Société Anonyme (SA), nécessite la définition d’un capital social.
Ce capital représente les ressources mises à disposition de la société au moment de sa création. Il constitue non seulement un gage de sérieux vis-à-vis des partenaires et des tiers, mais aussi une base de répartition des droits entre associés ou actionnaires.
Le montant requis et les modalités de libération varient selon la forme juridique choisie. Il est donc essentiel d’en comprendre les exigences pour assurer une création d’entreprise conforme à la législation ivoirienne.
I. Les Exigences Minimales de Capital Social
1. Pour la Société à Responsabilité Limitée (SARL) :
Le capital social doit être d'un million (1.000.000) de francs CFA au moins, sauf dispositions nationales contraires. En pratique, de nombreux États membres de l'OHADA, y compris la Côte d'Ivoire, ont par la suite adopté des lois nationales permettant la création de SARL avec un capital social inférieur à ce montant, voire librement fixé par les statuts (par exemple, à partir de 1 franc symbolique).
Il est divisé en parts sociales égales dont la valeur nominale ne peut être inférieure à cinq mille (5.000) francs CFA.
2. Pour la Société Anonyme (SA) :
Le capital social minimum est fixé à dix millions (10.000.000) de francs CFA.
Le capital minimum de la société faisant appel public à l'épargne pour le placement de leurs titres dans un ou plusieurs États parties est de cent millions (100.000.000) de francs CFA.
II. La Souscription du Capital : Un Prérequis Commun
La souscription du capital constitue l’acte juridique par lequel une personne s’engage à faire partie d’une société, en apportant une somme ou un bien en nature d’un montant égal au nominal de ses titres.
1.L’ Obligation de souscription intégrale pour la SARL
En Côte d’Ivoire, la législation exige que le capital social soit intégralement souscrit au moment de la constitution d’une Société à Responsabilité Limitée (SARL).
Autrement dit, les associés doivent s’engager à verser la totalité du capital prévu, même si le paiement effectif (libération) peut être partiel au départ.
Exemple : Si une SARL est créée avec un capital de 1 000 000 F CFA, les associés doivent souscrire la totalité de cette somme.
Libération minimale : au moins 50 % doit être effectivement versé à la constitution. Le reste peut être libéré dans un délai de 2 ans à compter de l’immatriculation au RCCM.
Cette règle vise à assurer une transparence dans la répartition des parts sociales et à sécuriser les engagements des associés dès le départ.
2. L’ Obligation de souscription intégrale pour la SA (avant signature des statuts)
Le capital social doit être entièrement souscrit avant la signature des statuts et la tenue de l’assemblée générale constitutive.
Cela signifie que tous les actionnaires doivent s’engager par écrit à libérer leurs actions respectives, même si le versement immédiat ne couvre qu’une partie du montant.
Libération minimale exigée :
- 25 % du montant des actions en numéraire au moment de la constitution.
- Le solde doit être libéré dans un délai de 3 ans.
La souscription intégrale avant la signature des statuts permet d’éviter les déséquilibres entre actionnaires, et donne une base solide à la future société pour sa reconnaissance légale.
III. La Libération des Apports : Distinctions Clés
Une fois le capital social souscrit, il doit être effectivement mis à la disposition de la société : c’est ce qu’on appelle la libération des apports. Cette libération peut prendre deux formes principales : en nature (biens) ou en numéraire (argent). Les apports en industrie sont possibles dans les SARL mais restent interdites dans les SA.
1. Les Apports en Nature
Les apports en nature correspondent à des biens autres que de l’argent (matériel, immeuble, véhicule, etc.).
Dans la SARL : Les apports en nature doivent être entièrement libérés dès la constitution de la société. Si la valeur d’un apport dépasse 5 000 000 F CFA ou s’il donne lieu à un avantage particulier, une évaluation par un commissaire aux apports est obligatoire. Le commissaire aux apports (expert indépendant) garantit que les biens ne sont pas surévalués, protégeant ainsi les autres associés et les tiers.
Dans les SA : Les apports en nature sont également intégralement libérés à la constitution. L’intervention d’un commissaire aux apports est systématique, quelle que soit la valeur des biens. Cela vise à assurer la transparence et la sécurité dans la répartition des actions.
2. Les Apports en Numéraire
Les apports en numéraire sont les sommes d’argent versées au capital social.
Dans la SARL : La loi exige un versement d’au moins 50 % du montant total des apports en numéraire au moment de la création. Le solde doit être libéré dans un délai de 2 ans à compter de l’immatriculation de la société au RCCM (Registre du Commerce et du Crédit Mobilier).
Dans les SA : Ici, la libération est plus souple : au moins 25 % du montant des actions en numéraire doit être versé à la souscription. Le reste peut être libéré dans un délai de 3 ans suivant l’immatriculation. Cette souplesse reflète la nature souvent plus complexe et capitalistique de la SA.
IV. La Formalisation de la Libération des Apports en Numéraire
1. Le Dépôt des fonds : Modalités similaires pour SARL et SA.
Pour la SARL, les fonds provenant de la libération des parts sociales sont déposés immédiatement par le fondateur, en banque, dans tout autre établissement de crédit ou de microfinance dûment agréé, ou en l'étude d'un notaire, contre récépissé, dans un compte ouvert au nom de la société en formation.
Pour la SA (sans appel public à l'épargne), les fonds provenant de la souscription des actions de numéraire sont déposés par les personnes qui les ont reçus, pour le compte de la société en formation, soit chez un notaire, soit dans un établissement de crédit ou de microfinance dûment agréé domicilié dans l'État partie du siège de la société en formation, sur un compte spécial ouvert au nom de cette société. (Voir aussi Article 827-4 pour les SA avec appel public à l’épargne).
2. La Déclaration Notariée de Souscription et de Versement (DNSV) : Un document clé pour les deux formes (SARL, SA).
Pour la SARL, la libération et le dépôt des fonds sont constatés par un notaire au moyen d'une déclaration notariée de souscription et de versement (DNSV), sauf dispositions nationales contraires.
Pour la SA (sans appel public à l'épargne), le notaire dresse une déclaration notariée de souscription et de versement sur présentation des bulletins de souscription et du certificat du dépositaire. (Voir aussi Article 827-5 pour les SA avec appel public à l’épargne).
Ainsi prend fin cet article sur le capital social des sociétés commerciales, d'Andréa TANON, juriste.
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