Comment saisir une juridiction par voie d’assignation ? (Droit ivoirien) - Ivoire-Juriste
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Comment saisir une juridiction par voie d’assignation ? (Droit ivoirien)
 
Comment saisir une juridiction par voie d’assignation  (Droit ivoirien)

Votre assignation est-elle valide ? Une erreur de procédure (comme l'oubli de l'heure d'audience) peut entraîner la nullité absolue de votre action en justice. Voici le guide pour sécuriser votre démarche en droit ivoirien.

Évitez la Nullité : Les Mentions Cruciales de l'Assignation en Justice (Art. 33 et 246 CPC Ivoirien)


Dans ce billet, nous allons détailler la procédure et les mentions obligatoires pour la rédaction et la signification d'un acte d'assignation, le mode de saisine de principe des juridictions en Côte d'Ivoire.

L'assignation est l'acte d'un commissaire de justice (anciennement huissier de justice) par lequel le demandeur cite son adversaire (le défendeur) à comparaître devant le juge.

Pour que l'instance soit valablement introduite, l'acte doit satisfaire à deux types de conditions : celles relatives à la forme et à la recevabilité de l'action, et celles relatives au bien-fondé.

I. Les conditions de forme et de recevabilité de l'acte

L'assignation étant un acte de commissaire de justice (exploit), elle doit respecter les mentions générales des exploits (Art. 246 du Code de Procédure Civile) et les mentions spécifiques aux actes introductifs d'instance (Art. 33 du Code de Procédure Civile).

A. Les mentions relatives à l'exploit (Art. 246 CPC)

Tout exploit, y compris l'assignation, doit contenir, à peine de nullité :

1. Date et heure de l'acte.

2. Identification du requérant (demandeur) : Nom, prénoms, profession, nationalité, domicile réel ou élu, et le cas échéant, nom de son représentant légal ou statutaire. Pour une personne physique, la date et le lieu de sa naissance sont exigés.

3. Identification du commissaire de justice : Son nom et sa résidence.

4. Identification du destinataire (défendeur) : Nom, prénoms, profession, et son domicile, ou, s'il n'a pas de domicile connu, sa dernière résidence.

5. Modalités de remise : La signature du destinataire ou son refus de signer avec les motifs, et le nom de la personne à qui l'acte est remis (si ce n'est pas le destinataire lui-même).

6. Signature du commissaire de justice sur l'original et la copie.

7. Coût de l'acte et l'objet de l'exploit.

8. Diligences du commissaire de justice : Il doit mentionner sur l'exploit ses diligences (les démarches entreprises pour remettre l'acte à personne) ainsi que les réponses faites à ses interpellations (Art. 247 CPC).

B. Les mentions spécifiques à l'assignation (Art. 33 CPC)

L'assignation introductive d'instance doit obligatoirement mentionner :

1. L’objet de la demande et l’exposé sommaire des moyens (l'argumentation juridique).

2. L’indication du tribunal qui doit connaître de la demande.

3. La date et l'heure de l'audience.

o Sanction : L'omission de ces mentions, notamment la date et l'heure de l'audience, peut entraîner la nullité de l'acte, qui est une nullité absolue si elle porte atteinte à une disposition d'ordre public ou est expressément prévue par la loi (Art. 123 CPC).

C. Les délais de comparution (Art. 34 CPC)


Un délai doit être respecté entre la date de l'assignation et celle de l'audience.


Lieu de Domicile du Défendeur

Délai minimal de comparution


Dans le ressort de la juridiction saisie

Huit (8) jours au moins


Dans un autre ressort en Côte d'Ivoire

Huit (8) jours + quinze (15) jours de distance


Hors du territoire de la République

Huit (8) jours + deux (2) mois de distance


Ce délai peut être abrégé par le juge en cas d'urgence ou si les parties y consentent.

D. La signification de l'acte

L'assignation est signifiée par le commissaire de justice (Art. 33, al. 2 CPC).
Signification à personne : Le commissaire de justice doit s'efforcer de délivrer l'exploit à la personne qu'il concerne (Art. 247 et 248 CPC).
Signification à domicile : Si le défendeur est absent, la copie peut être remise à une personne présente au domicile (conjoint, parent, etc.), sous enveloppe fermée, avec avis de réception. Si l'huissier ne trouve personne, il peut remettre une copie à certaines autorités (chef de quartier, maire) et aviser le destinataire par lettre recommandée (Art. 250 et 251 CPC).
Signification à l'étranger (Art. 254 CPC) : Si la personne visée habite à l'étranger, le commissaire de justice remet une copie de l'exploit au Parquet du domicile du demandeur (Procureur de la République ou son substitut). C'est le Parquet qui envoie la copie au Ministère des Affaires étrangères pour remise par la voie diplomatique, sauf convention d’entraide judiciaire.

E. La compétence du tribunal

Il est crucial de saisir la bonne juridiction.

1. Compétence territoriale (Art. 11 CPC) : Le principe est le "Forum Rei" (le tribunal du domicile du défendeur).

o Le tribunal compétent est celui du domicile réel ou élu du défendeur ou, à défaut de domicile, celui de sa résidence.

o Exceptions notables : En matière de pension alimentaire, le tribunal du domicile du demandeur est aussi compétent. En matière immobilière, c'est le tribunal de la situation de l'immeuble (Art. 12 CPC).

2. Compétence d'attribution (Art. 5 et 6 CPC) :

o Tribunal de Première Instance (TPI) : Juge de droit commun pour les affaires civiles, commerciales, administratives et fiscales.

o Tribunal de Commerce : Exclusivité pour les litiges commerciaux si l'intérêt est supérieur à un milliard de francs (ou pour les affaires non soumises au TPI ou Tribunal du Travail).

o Exemple dans le cas d'espèce : Pour un commerçant, le Tribunal de Commerce est compétent. Pour une personne civile, c'est le TPI du lieu de domicile du défendeur (ou du lieu d'affectation pour un fonctionnaire, selon votre source initiale).

II. Les conditions tenant au bien-fondé (Le contenu de l'acte)

L'exposé des moyens et de l'objet de la demande constitue le fondement de l'action. Il est traditionnellement rédigé en deux parties principales.

1. Le rappel des faits

Il s'agit de contextualiser l'action en justice en exposant clairement et précisément les faits qui ont conduit au litige.
Rigueur : Il est impératif de respecter la chronologie des faits.
Pertinence : Ne mentionner que les faits qui ont une incidence directe sur le fond de l'action ou qui sont nécessaires à la compréhension de l'argumentation.
Forme : Le style doit être clair, précis et soutenu.

2. La Discussion (Moyens de droit ou Conclusions)

C'est ici que l'on développe l'argumentation juridique, souvent sous forme de plan structuré (titres et sous-titres) pour la clarté.
Démonstration : Il faut articuler les faits allégués avec les règles de droit applicables (lois, règlements, jurisprudence) pour démontrer que l'action est bien fondée.
Conclusions : C'est la demande formulée au juge. Elles doivent être précises : obtenir le paiement d'une somme, l'exécution d'un contrat, l'annulation d'un acte, etc.

Référence légale : Art. 33, al. 1er du CPC, Art. 246 et suivants du CPC, Art. 254 du CPC.

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